mardi 29 avril 2014

MANGEZ-LE SI VOUS VOULEZ ... Théâtre Tristan Bernard *****

Un décor de cuisine pour une pièce mitonnée "aux petits oignons". © France 3 / Culturebox
Exhumé en 2009 par l'écrivain Jean Teulé, c'est un fait divers d'une rare barbarie qui est aujourd'hui raconté sur la scène du théâtre Tristan Bernard à Paris. En 1870, en pleine guerre contre la Prusse, les habitants d'un village de Dordogne pris de folie, agressèrent sauvagement un jeune homme qu'ils finirent pas brûler et...manger !
"Et pourtant, nous étions de braves gens". C'est en ces termes que l'un des villageois accusés en 1870 d'avoir battu, torturé et finalement mangé un jeune homme, conclut le procès qui vit la condamnation à mort de quatre personnes.
L'histoire, telle que l'a racontée Jean Teulé dans son roman "Mangez-le si vous voulez" (Julliard - 2009) est l'un des faits divers les plus effrayants de l'Histoire. 16 août 1870 à Hautefaye en Dordogne. Un jeune noble de la région, Alain de Monéys se rend à la foire. Il n'en reviendra pas. Pris pour un sympatisant prussien après une phrase malheureuse, il sera battu, torturé et finalement brûlé par une foule en furie. Des villageois tout à fait respectables, qui appréciaient en outre le jeune homme, et qui auront bien du mal à expliquer cette hystérie collective qui se conclut par la phrase désormais célèbre du maire de la commune : "Mangez-le si vous voulez".

Une mise en scène osée

Adapter ce fait divers dérangeant au théâtre relevait du défi. Comment traduire en effet toute la sauvagerie et en même temps la cocasserie de l'histoire dans l'espace limité d'une scène ? Le parti pris retenu par les deux co-metteurs en scène Clothilde Morgiève et Jean-Christophe Dollé qui sont aussi les comédiens de la pièce, est radical et plutôt osé. Dans un décor de cuisine, elle joue la villageoise au bon sens "paysan" qui trouve dommage de "gâcher cette bonne graisse" (celle du supplicié !) et en fait des tartines "pour les enfants". Quant à Jean-Christophe Dollé, il joue à la fois la victime et ses bourreaux enchainant les répliques ciselées à l'acide de ce conte cruel et fascinant.

"Mangez-le si vous voulez" de Jean Teulé, adapté et joué par Clothilde Morgiève et Jean-Christophe Dollé accompagnés sur scène par deux musiciens Mehdi Bourayou et Laurent Guillet. Au Théâtre Tristan Bernard jusqu'au 29 mars 2014.

FranceTVinfo

Jean Teulé développe dans son roman une vision très noire de l'humanité. Il relate un terrible fait divers où les forces les plus obscures se déchaînent dès que les circonstances s'y prêtent. Un homme sort de chez lui pour se rendre à la foire du village. Là, les paysans, pourtant des amis d'enfance, voient en lui, en pleine guerre de 1870, un Prussien ou un antifrançais. Rendus fous par l'alcool, la misère, la haine, ils le lynchent, le torturent, le brûlent, le mangent. L'adaptation théâtrale est captivante et inventive. La violence barbare est exprimée par les gestes d'une femme, image de réclame des années 50, qui, dans sa cuisine, coupe, déchire des aliments et en brûle les graisses. Jean-Christophe Dolle et Clotilde Morgiève interprètent tous les personnages avec une certaine ironie. Ils sont épatants.
*** Sylviane Bernard-Gresh TELERAMA

Quoi ? Une adaptation virtuose du livre de Jean Teulé sur un fait divers historique, survenu en Dordogne durant la guerre de 1870. Avant de partir au front, un jeune villageois apprécié se rend à la foire annuelle. Une phrase sortie de son contexte et le voilà pris à parti par voisins et amis, accusé d'être pro-Prussiens. La haine collective rampe, la violence fermente et la barbarie jaillit...

Qui ? Un duo de metteurs en scène et comédiens complémentaires, cofondateurs de la compagnie Fouic Théâtre. A Jean-Christophe Gollé, la parole, non-stop (il interprète la victime et les bourreaux) ; à Clotilde Morgièvre, un rôle quasi muet mais pluriel (la mère, la mégère, l'aimée...) et d'un symbolisme puissant. A leurs côtés, deux musiciens impriment au récit de saisissantes vibrations.

Pourquoi ? Pour sonder le mystère de cette folie incontrôlée qui parfois s'empare d'une communauté. De la foule qui exécute de supposés collabos à la Libération au lynchage de touristes innocents à Madagascar, les exemples se multiplient...

Comment ? En sortant l'événement de son carcan pour en souligner l'intemporalité. Un décor modulable ; des costumes tout en contrastes (une comédienne au look 50's, des musiciens très Men In Black, un narrateur au costume mi-rustique, mi-dandy), des riffs électro-rock menaçants ou des airs de comptines enfantines sur lesquels les acteurs fredonnent des horreurs ; une cuisinière au coup de hachoir éloquent... La pièce fourmille de trouvailles scéniques qui produisent des effets très spéciaux sur le spectateur. Le laissant pétrifié d'émotion et d'admiration.


*** Sophie Berthier TELERAMA




Objectif diffusion Adami - SACD : Mangez-le si... par ADAMI

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